nébuleuse

"mia ramène toi t'es encore en retard!". la brune ouvre les yeux, voit l'heure -cinq heures-, essaye de se redresser, en vain. le pouvoir du lit est plus fort. elle referme tranquillement les yeux, sans mot dire. morphée l'attend, il est bien trop tôt. mais c'est sans compter les phénomènes avec qui elle partage son appartement depuis maintenant cinq ans. une porte qui s'ouvre, une lumière qui s'allume, un poids mort qui se jette sur son lit. "dégage de là!" elle grogne, la môme qui n'a jamais été de bonne humeur le matin. mais rien n'y fait, bien vite une sensation de froid lui parcourt le corps, la voilà sans couette, réveillée malgré elle. non sans marmonner quelques mots doux à ses chers et tendres colocataires, elle finit par se lever pour de bon, déjeuner, se laver, s'habiller, attraper son sac de voyage, et partir pour l'aéroport. depuis son petit hublot, elle regarde londres, sa ville, son âme sœur qui devient de plus en plus petite. ça lui fait toujours quelque chose de la quitter, cette ville. mais elle sait que quand elle part, c'est toujours pour revenir.  

aussi loin qu'elle s'en souvienne, toute sa vie est liée à londres. de sa naissance jusqu'à aujourd'hui, elle est toujours demeurée dépendante de la grisaille, de toutes les petites rues atypiques, bref de toute la ville. mia, elle a grandi dans une famille d'artistes, avec des parents musiciens. ses parents, elle les aime beaucoup. même s'ils n'ont jamais été beaucoup présents, elle admire leur vie. elle envie leur liberté, leurs tournées à travers le monde remplies d'aventures et d'émotions. la gosse a toujours aimé entendre leurs histoires quand ils rentraient la voir.

elle a passé pas mal de temps avec une nourrice, la brune. jusqu'à ce qu'elle soit assez âgée pour partir en internat. c'est sans doute là-bas qu'elle a pris le défaut d'être un peu malicieuse. elle y a fait les quatre cent coups, actuellement elle en est encore fière, la môme. elle n'a jamais eu de gros problèmes durant son enfance. elle en a plutôt causé, cancre qu'elle était, pas capable de se concentrer plus de dix minutes en cours, toujours en train de dessiner sur ses feuilles à la place de résoudre ses équations. elle a désespéré de nombreux profs, avant de finalement trouver sa voie, après le lycée: l'art.

elle a jamais su ce qu'elle voulait faire dans l'art, la gamine. mais une chose était sûre pour elle: elle voulait tracer sa vie dans ce domaine. toute ça s'est fait assez naturellement, à vrai dire. elle avait toujours un crayon ou un pinceau derrière l'oreille, et la gosse est partie assez naturellement en filière d'arts anciens et modernes. elle a complété ça sur un coup de tête en partant dans le commerce de l'art, et elle est devenue courtière, il y a un an à peine. chercher des œuvres pour des gens, ça lui plaît. négocier, ça l'amuse, ça la motive et ça entretient son caractère compétitif et obstiné -au plus grand malheur de ses proches-. mais plus encore, flâner au milieu d’œuvres à longueur de journée, ça la plonge dans un bonheur sans nom.

le soir, quand elle rentre chez elle, elle retrouve ses deux colocs dans leur petit appartement londonien. c'est un sanctuaire, un cocon, un petit nuage qui flotte au dessus de tous les problèmes. elle a emménagé avec eux dès la sortie du lycée, et elle l'avoue volontiers: elle les aime. ils représentent sa seconde famille, ils n'ont aucun secret. c'est ce qui avait toujours manqué à mia, des gens avec qui tout partager, rôle que ses parents n'ont jamais vraiment pu tenir. du point de vue de la brune, sa vie est comblée.

une secousse, deux secousses. elle jette un regard méfiant à travers le hublot tandis que l'avion prend de la hauteur. non, elle n'aime pas spécialement cette chose. elle observe les gens calmes et impassibles autour d'elle, se demande à quoi ils pensent, curieuse comme à son habitude. elle finit par éteindre son portable, regarde autour d'elle. ne sachant pas quoi faire, elle attrape le crayon coincé derrière son oreille, son carnet, et dessine.